Éloge en toc du cumul des mandats : c'est Patrick Weil qui s'y colle...

Publié le par UDB-Saint-Herblain Loire Erdre

WEIL PatrickOn a connu Patrick Weil mieux inspiré, notamment à propos de l'accueil et de l'intégration des étrangers. Mais l'historien, politologue et maître de conférences à l'Institut d'Études politiques de Paris, n'a sans doute pas pu résister, et Le Monde daté de ce jour publie sa tribune intitulée "Il faut cumuler les mandats politiques ! Seul contrepoids au pouvoir de l'exécutif.".

Sa thèse part du constat - qu'on peut partager - que nulle part ailleurs qu'en France les pouvoirs du Chef de l'État ne sont aussi grands, et que des réformes comme le passage du septennat au quinquennat, avec élection des députés dans la foulée de l'élection présidentielle, les ont de fait renforcés. Le cumul des mandats garantirait alors l'heureuse et utile présence en face de lui d'élus à la fois nationaux et locaux solidement implantés et en mesure de faire contrepoids à ses pouvoirs.

Patrick Weil semble oublier que nulle part ailleurs qu'en France, le cumul des mandats n'est pareillement élevé au rang d'institution, et ce depuis bien avant la Cinquième République. Non seulement il ne semble pas avoir empêché la concentration des pouvoirs dans les mains du Chef de l'État, mais la concomittance entre cumul des mandats et centralisation du pouvoir est l'une des caractéristiques majeures de l'exception politique française. Le cumul des mandats est le ciment local et l'alibi de la centralisation : pourquoi décentraliser, quand on a la chance d'être personnellement représenté au centre du pouvoir par son élu local ?

Patrick Weil ne prend pas davantage en compte l'impossibilité matérielle, pour des élus, d'exercer simultanément et personnellement plusieurs mandats, ce qui fait du cumul une machine à déléguer officieusement une partie de ceux-ci à l'abri du regard de l'opinion, et à édifier autour de ces délégations des réseaux d'obligés dont la perpétuation intéressée altère en profondeur le fonctionnement de la démocratie. Le cumul des mandats et leur renouvellement indéfini sont , avec la centralisation qu'ils confortent, les principales racines de l'immobilisme français; le pire des contrepoids à un chef de l'Exécutif élu par exemple pour le changement...

Les républicains sincères qui se laissent duper par les mauvaises raisons de prolonger ce mauvais système, doivent relire le discours prononcé le 16 mai 1791 devant l'Assemblée constituante par Robespierre, et notamment ces passages :

"Nous n’avons ni le droit ni la présomption de penser qu’une nation de vingt-cinq millions d’hommes, libre et éclairée, est réduite à l’impuissance de trouver facilement sept cent vingt défenseurs qui nous vaillent.", et :

"Je n’aime pas que des hommes habiles puissent, en dominant une assemblée (...), préparer, assurer leur domination sur une autre, et perpétuer ainsi un système de coalition qui est le fléau de la liberté". Et enfin : 

"Sinon la loi, loin d'être la volonté générale, ne sera plus que l'expression des caprices et des intérêts particuliers (...) ; les représentants - ligués contre le peuple avec le ministère et la cour, deviendront des souverains et bientôt des oppresseurs".

Publié dans Centralisation

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